23.01 : à bas les masques

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Overthink a Minute
4 min ⋅ 23/01/2025

C’est une chose étrange que de rencontrer des nouvelles personnes. Tous les jours, on rencontre des gens. Dans la rue, au café, au bar, au travail, au sport, sur les réseaux sociaux… Tous les jours, des opportunités de découvrir de nouvelles personnalités. Et comment on aborde un inconnu ? Je ne sais jamais. En fait, souvent, j’estime que ça ne vaut pas le coup. Pas le coup, parce que je déteste les small talks. Tu sais, ce genre de conversations, autour de la météo, de ce que chacun a fait hier ou avant hier, des « et le boulot, ça va ? »… Ce n’est pas la personne en face que je trouve inintéressante, mais plutôt moi qui me trouve d’un ennui mortel. J’admire le genre de personnes qui te raconte immédiatement une anecdote sur eux. J’ai une collègue comme ça. Chaque jour, elle me surprend. Le lundi, alors que les enceintes déversent Hotel California dans le café, elle confie qu’elle a fait le meilleur plan à trois de sa vie sur cette chanson. Le mardi, elle évoque ces expériences de bad trip après consommation de champignons et d’ecstasy. Le mercredi, elle raconte qu’elle a croisé un ancien plan cul un peu macho à qui elle a dit, devant tous ses amis, qu’il était nul au lit. Mieux vaut lui dire, qu’il s’améliore pour les prochaines. J’admire. J’admire, pas nécessairement toutes ses actions, mais cette simplicité d’être elle-même. Cette authenticité. 

Pour ma part, je ne me confie que peu, voire très peu. Même à mes amis proches. Souvent parce que j’estime que ce n’est pas intéressant. J’ai peur d’être d’un ennui mortel. Alors je préfère dévier. Parler des autres, de la météo, de ce qu’ils ont fait hier ou avant-hier… Tout plutôt que de parler de moi. Et dans le cas où je parle de moi, je préfère évoquer des choses positives, des choses qui me rendent fières. Force est d’admettre qu’en ce moment, la fierté n’est pas le premier sentiment que j’éprouve lorsque je pense à moi. Ça c’est intéressant. Pourquoi est-ce si dur d’évoquer nos hontes, nos vulnérabilités, nos faiblesses ? J’emploie le « nous » mais peut-être en va-t’il autrement pour les autres. Je préfère adopter en tout temps un masque. Qui évolue selon mon humeur : joie, force, snobisme, froideur, distance, maturité, spontanéité… Je m’adapte. Mais peut-être qu’il est temps de les faire tomber, ces masques. Le masque, c’est le mystère, c’est séduisant, mais c’est aussi synonyme de méfiance. Et c’est épuisant. Surtout. Alors, enchantée, je m’appelle Zoé. J’ai 27 ans, je travaille dans un café, dans la station où j’ai grandie. J’aime bien, disons que ça m’occupe en attendant, d’autant que j’aime m’occuper des gens. En attendant quoi ? Ma foi, que mes doigts écrasent le clavier et parviennent à écrire un truc potable, que quelqu’un voudra bien publier. Non, on a dit qu’on arrêtait les masques. Je voudrais écrire un truc qui change une vie. Ou simplement que je trouve un taf qui me plaise vraiment, peut-être dans le sport, peut-être dans l’évènementiel, ou alors quelque chose lié à l’art. Globalement, en attendant que je ne sois plus perdue, que je me fixe un cap, pour réaliser mon objectif ultime : obtenir mon indépendance. Totale. Ma plus grande peur ? C’est de finir seule. Entièrement seule. J’ai vu quelqu’un finir comme ça, et ça me fait froid dans le dos. Ce qui m’a poussé dans le passé à accepter certaines choses, à ne pas poser des limites, simplement pour de la compagnie. Au fur et à mesure, j’ai compris qu’il valait mieux être seule que mal accompagnée, et je crois que ça me sauve. Je suis bien plus regardante sur les personnes qui m’entourent, et je crois avoir bon gout, désormais. Je suis perchée. Genre vraiment vraiment perchée. Je crois aux signes, aux symboliques, dans tout. Ah, et je ne crois pas au hasard. Pour moi, il y a un grand Tout, avec des lois, qui nous poussent à grandir. A nous d’en saisir les opportunités. Je me méfie beaucoup des gens, ce qui m’amène à être froide. Mais j’essaie de faire confiance. Promis. Je suis froide aussi parce que je suis très emphatique. Que j’ai une tendance à prendre sur moi les émotions des autres, et notamment les personnes qui me sont proches. Alors je crée une certaine distance, parce que moi, les émotions, je ne sais pas les gérer. Enfin, j’ai du mal. Je me suis déjà demandée si je n’étais pas un peu autiste sur les bords. Mais c’était me mettre dans une case, et moi, les cases, je n’aime pas ça. Ce que je veux, c’est être libre. A tout prix. Alors pas question de se placer dans un tiroir. J’ai aussi très peur d’être dépressive. Y’a des antécédents, dans la famille. Ça m’inquiète, parce que quand je suis down, je suis down. Je m’efforce de parler, mais c’est compliqué. Je suis une romantique aussi, je crois au grandiose, aux histoires qu’on lit dans les livres ou qu’on voit dans les films. En fait, je crois au grandiose dans à peu près tout. Aux miracles. Aux coups de chance. Pas tous les jours, hein. Mais en général, oui. Du moins je m’y efforce. Je lutte en permanence contre une forme de pessimisme naturel qui me hante. Contre les petites voix négatives dans ma tête. Qui m’amènent à me poser des questions salvatrices, mais qui me bouffent aussi. J’ai de l’estime pour moi-même. De l’estime, une certaine appréciation de mes compétences, mais un gros blocage quant à leur exploitation, ce qui génère un épisode de honte de moi assez tenace. Je souffre aussi probablement d’un léger syndrome de l’imposteur, qui me pousse à penser que je ne mérite pas les bonnes choses qui m’arrivent. J’ai bien conscience que c’est comme ça pour beaucoup de monde autour de moi, et j’ai du mal à percevoir une solution. Quand bien même je voudrais me montrer mature, et prendre de la hauteur, j’ai beaucoup de mal à ne pas prendre à coeur ce qui arrive à mon cercle proche. Ça m’a déjà rendu littéralement malade. Trop sensible. Même si je pleure pas. Par contre, quand les vannes sont ouvertes, attention le Titanic. J’ai du mal avec la féminité, comme avec les chats. Pour moi, c’est la même chose : le secret, la vanité, la jalousie, la possessivité, la séduction, la trahison. Ce qui fait que j’ai réfuté cette part de moi. Pas nécessairement physiquement mais quand même. Je suis en train de me réconcilier avec tout ça, et ça me fait du bien. J’ai l’impression d’être plus entière. Je lis. Beaucoup. Je peux te citer un nombre conséquent de capitales mondiales, chanter un paquet de chansons, et pourtant, j’ai beaucoup de mal à régler le moindre problème de maths. C’est une logique qui m’échappe. Comme le sens de la corde dans les dégaines en escalade. Je ne sais pas pourquoi, je ne comprends pas. 

Je pourrais continuer encore et encore, mais je crois que finalement, tout ça, c’est le travail d’une vie. Et que pour quelqu’un qui ne livre pas, il y a assez de confidences pour ce soir. Tiens, ça aussi, c’est marrant : on parle de se livrer pour se confier, alors que je lis beaucoup et ne me confie que peu. C’est que finalement, je dois pas être si nulle. Quand je dis que je suis perchée… Sur ce, bonne nuit 

Overthink a Minute

Par Zoé André