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A sa non réponse, j’ai su. Su que quelque chose n’allait pas, que ce que je pressentais était donc vrai. Ce que je n’ai su qu’après en revanche, c’est toute la détresse dans laquelle il se trouve actuellement. Et ça m’a brisé le cœur. Pourquoi doit-il endurer tout ça ? La vie est injuste. Je n’arrive vraiment pas à voir le point positif de certaines situations. Je ne comprends pas ce que tu peux apprendre de ça. Hormis que la vie est injuste et imprévisible. Peut être que tu finis par affiner ta liste de priorités. Par préserver ton énergie pour les choses qui comptent vraiment. Par déterminer même, ce qui compte vraiment.
A entendre des histoires comme celle-ci, je me retrouve démunie. Partagée entre le soulagement de ne pas vivre tout ça, de ne pas en être à ce point de ma vie, la prise de recul sur soi (après tout ma vie est franchement cool, je devrais arrêter de me focaliser sur certains problèmes), la culpabilité, bien évidemment, de ressentir du soulagement, sale égoïste, et l’infinie tristesse que je ressens à la simple mention du nom de mon ami. Même sans le mentionner en fait : une obsession morbide me hante depuis ce matin. Heureusement que je bosse : c’est une porte de sortie idéale pour mes pensées et émotions en tous genres. Peut-on vraiment genrer une émotion ou une pensée ? Parfois oui, parfois non. Mais je m’égare. La réalité est beaucoup plus complexe : à ce soulagement, à la tristesse s’ajoute également la peur. Peur d’évoluer. Tu vois ce qui arrive dans un monde d’adultes ? Ça craint. Compréhension aussi. Je comprends mieux pourquoi j’ai slalomé entre les responsabilités jusqu’à maintenant. Gerbe. Pas la nausée physique, mais juste ce sentiment d’estomac qui se retourne face, et je ressasse, à l’injustice du monde. Certaines personnes font face à des défis colossaux. Je suis toujours d’avis que chacun dispose de son propre niveau de perception par rapport à ce qu’il vit mais quand même. Il y a des choses qui craignent, universellement. Et pourtant, chacun les gère, différemment. Même dans un couple. Dans le cas présent, le boss de mon ami lui a dit de prendre soin de sa femme. Mais la perte d’un enfant, ça concerne les deux. Qui s’occupe de lui ? Dans ces histoires, on met souvent l’homme sur le banc de touche. Socialement. Mais lui aussi s’est projeté, même s’il n’a pas senti les premiers soubresauts de vie au creux de ses entrailles. Autorisons les hommes à avoir des émotions bordel de merde. Nul doute que la communication entre eux et nous sera d’autant plus fluide. Ce coup de gueule est désormais terminé.
Comment font-ils, eux, pour fuir leur réalité, pour échapper à la douloureuse tragédie qu’est désormais leur vie ? Ils finiront bien par guérir. Mais toujours ils se souviendront. C’est étonnant, des fois, de se rappeler sa peine. D’essayer d’en reconstituer les contours. Même pour les douleurs physiques. Et finalement de se dire qu’on a dépassé tout ça. Un peu plus branquebalant qu’avant, mais toujours debout. Ou plutôt, debout autrement. Ou alors on est carrément devenu quelqu’un d’autre. Ça peut arriver. Un peu comme Arya dans Game of Thrones. On fait tomber le masque.
Pardon je suis perplexe. Plongée dans mes pensées. Toutes tournées vers lui. Mon ami. Si je continue de décortiquer, il y aussi un autre sentiment, qui part du cœur et de la gorge (du moins c’est ainsi que je le situe) et qui interdit toute auto victimisation et tout apitoiement sur soi. Finalement, c’est probablement le plus intéressant parce que celui-ci est porteur d’action. C’est un sentiment qui revient souvent, à toute évocation du malheur du monde. Mais je n’en avais pas perçu toute la portée justement. Toute l’impulsion qu’il offre, parce que souvent caché derrière la peur et le manque de foi. J’imagine que c’est la qu’on voit qu’on gagne en maturité. Quand on est prêt à assumer davantage de responsabilités, même face à l’imprévisible adversité. Après tout, on ne sait pas de quoi demain est fait.